1. Introduction
Dans une conception de l’actionnariat basée sur l’opposition pure et dure des intérêts entre minoritaires et majoritaires, certainement. Mais il en va autrement lorsque la participation à l’actionnariat est conçue d’une manière constructive, où les règles de bonne gouvernance sont respectées et où tous les actionnaires jouent le jeu du caractère collégial de l’assemblée générale, fondé sur le principe de la délibération où chacun exprime son opinion et où de la confrontation des idées naît la meilleure solution possible pour la société.
Sans doute cette dernière conception est-elle idéalisée et théorique, mais elle devient de plus en plus concrète au fur et à mesure que les principes du développement durable percolent dans la gestion des sociétés, principes au rang desquels figure en bonne place la bonne gouvernance.
2. Le principe majoritaire
Le principe majoritaire est la pierre angulaire du processus décisionnel dans les sociétés. Il signifie que, sauf exceptions prévues par la loi, les résolutions de l’assemblée générale (et des autres organes) sont prises à la majorité absolue et qu’elles s’imposent à l’ensemble des actionnaires à condition (i) qu’elles soient formellement régulières et (ii) qu’elles ne soient pas contraires à la loi ou aux statuts.
Ce principe procède d’une exigence d’efficacité afin de permettre une prise de décision rapide et agile, et d’éviter des palabres sans fin.
Les règles de bonne gouvernance commandent de ne recourir au principe majoritaire que lorsque la délibération ne permet pas, dans un temps raisonnable, d’arriver à un consensus et qu’une décision claire est nécessaire.
3. Qu’est-ce que la majorité absolue ?
La majorité ordinaire au sein d’un organe délibérant est la « majorité absolue », qui correspond :
- lorsque le nombre total des voix est pair, à la moitié des voix plus une, ce qui signifie qu’en cas de parité la proposition est rejetée ; et
- lorsque le nombre total de voix est impair, à la moitié du nombre entier immédiatement inférieur à ce total, augmenté d’une unité
4. Comment calcule-t-on le nombre de voix – et donc la majorité ?
Par défaut, l’on doit d’abord constituer une masse de tous les votes valablement exprimés et c’est par rapport à cette masse de votes valablement exprimés que la majorité se calcule.
5. Un minoritaire n’est pas l’autre
Il ressort de ces règles qu’un actionnaire minoritaire n’est pas celui qui dispose de moins de la moitié des actions, mais il s’agit de celui qui dispose d’un poids votal inférieur à la moitié des voix valablement exprimées.
Si l’actionnaire qui dispose de plus de 50 % des actions ne vote pas, soit qu’il ne participe pas à l’assemblée générale, soit qu’il s’abstient ou que son vote est annulé, la majorité se calcule par rapport au vote valablement exprimé par les autres actionnaires qui détiennent moins de la moitié des actions.
Par exemple, si A détient 85 % des actions, B : 7 % des actions et C : 8 % des actions, et que A est absent à l’assemblée générale, la décision sera prise selon le vote exprimé par C puisque entre B et C, c’est C qui détient la majorité.
Et donc, contrairement à ce que laissait entendre le célèbre credo d’Albert Frère, un actionnaire ne détenant qu’une petite fraction du nombre d’actions peut, lorsque les circonstances sont réunies, devenir un actionnaire majoritaire dans le processus décisionnel, et emporter une décision qui s’imposera à l’actionnaire détenant la majorité des actions.
Ces principes sont largement développés dans le premier tome du MAM – Manuel de l’actionnaire minoritaire des sociétés non cotées : https://lnkd.in/eDmmCd3D
Nous verrons dans les présentations ultérieures quels sont les outils permettant de respecter les droits des actionnaires minoritaires et quelles sont les limites de ces droits.
Le 17 août 2024
PB