I. Introduction
Qu’il s’agisse d’une vente, d’un apport ou d’une donation, la cession d’un fonds de commerce doit être notifiée aux administrations fiscales et sociales.
Cette exigence imposée par le législateur vise à prévenir la fraude, notamment celle consistant à céder un fonds de commerce sans avoir préalablement réglé les dettes fiscales et sociales s’y référant, telles que l’impôt sur les sociétés, la TVA et les cotisations de sécurité sociale des travailleurs salariés et indépendants.
Le non-respect de cette formalité peut entraîner des conséquences financières sévères pour le cessionnaire.
II. Notification
II.A. Le principe
Le législateur impose la transmission d'une copie certifiée conforme de l'acte de cession aux administrations sociales et fiscales compétentes, à savoir le receveur des contributions du lieu de résidence ou du siège social du cédant, le receveur de la TVA, et des organismes chargés de percevoir les cotisations sociales (ONSS – INASTI).
Bien qu'aucun mode de notification spécifique ne soit exigé, il est suggéré de procéder par un envoi recommandé pour plus de sécurité.
II.B. L’opposabilité différée de la cession du fonds de commerce
La cession du fonds de commerce ne deviendra opposable aux administrations fiscales et sociales qu’à la fin du mois suivant la notification de la cession.
Durant ce délai d’inopposabilité, les administrations sociales et fiscales pourront prendre des mesures conservatoires ou exécutoires sur les biens cédés pour garantir le recouvrement de leurs créances.
En clair, jusqu'à l'expiration de ce délai, les administrations sociales et fiscales auront le droit de saisir les biens cédés comme si la cession n’avait pas eu lieu.
Tant que la notification n'a pas été effectuée, les biens peuvent être saisis à tout moment pour couvrir les dettes fiscales et sociales du cédant.
III. La Solidarité du cessionnaire
Le cessionnaire est tenu solidairement de régler les éventuelles dettes fiscales et sociales que le cédant n’aurait pas acquittées et arrivées à échéance à l’expiration du délai d’inopposabilité.
Cependant, cette solidarité est limitée au montant du prix de cession déjà versé durant le délai d’inopposabilité ou à sa valeur, notamment dans le cas d’un apport.
IV. Éviter l’opposabilité différée et la solidarité du cessionnaire
IV.A. Notification avec les certificats
Pour éviter les effets de l’opposabilité différée de la cession et de la responsabilité solidaire du cessionnaire à l’égard des dettes fiscales et sociales du cédant, le cédant est tenu de aux administrations sociales et fiscales en joignant les certificats suivants :
- certificat d’absence de dettes des cotisations des travailleurs indépendant[1];
- certificat d’absence de dettes des cotisations des travailleurs (ONSS) [2].
- certificat d’absence de dettes du receveur des contributions[3];
Le cédant doit solliciter ces certificats en complétant et en transmettant les formulaires de demande prédéfinis disponibles auprès des administrations sociales et fiscales compétentes.
Concernant l’administration fiscale, le formulaire de demande doit être adressé au receveur du domicile ou du siège social du cédant.
Après réception du formulaire de demande, l’administration concernée doit statuer sur l’octroi ou le refus d’émettre le certificat d’absence de dette dans un délai de trente jours à dater de la demande.
Ces certificats seront refusé si, au moment de la demande, le cédant a des impayés d'impôts, de cotisations, ou si la demande est faite après l’annonce d’un contrôle.
En matière d’impôts directs et de TVA, un refus peut également être émis si une demande de renseignements sur la situation fiscale du cédant a été envoyée.
Les certificats, s’ils sont délivrés ont une durée de validité de trente jours, et la notification de l’acte de cession du fonds de commerce doit être faite dans ce délai pour que le cessionnaire puisse éviter les risques liés à l’opposabilité différée et à la responsabilité solidaire.
C'est ainsi qu’un cessionnaire prudent exigera que le cédant assure n’avoir aucune dette en matière de TVA, ISOC, ou de cotisations sociales auprès de l’ONSS ou de l’INASTI.
Il demandera également, avant tout transfert de propriété, les certificats des administrations fiscales et sociales prouvant l’absence de telles dettes fiscales et sociales.
Il est donc prudent de subordonner la cession à l'obtention de ces certificats.
IV.B. Notification sans certificat
En l’absence des certificats, la convention de cession du fonds de commerce devra tout de même être notifiée aux administrations sociales et fiscales afin de faire courir le délai d’inopposabilité de la cession.
La non délivrance des certificats par les administrations fiscales et sociales signifie que le cédant du fonds de commerce est redevable de dettes fiscales et/ou sociales.
Si le cessionnaire souhaite poursuivre la cession du fonds de commerce dans ces conditions, il est recommandé d’inclure dans la convention de cession une clause stipulant que le paiement du prix de vente ne sera effectué qu'après l'expiration du délai d'inopposabilité.
Cette précaution permettant de contourner les effets liés à la solidarité du cessionnaire.
Une alternative consisterait à verser une première tranche du prix de cession du fonds de commerce d'un euro symbolique pendant le délai d'inopposabilité.
V. Conclusion
Vendre ou acquérir un fonds de commerce peut être une opération complexe, nécessitant une parfaite maîtrise de la législation applicable et des implications pratiques, notamment en ce qui concerne la notification de la cession.
Chez BOSSARD & ASSOCIES, nos avocats spécialisés vous accompagnent à chaque étape de la cession d’un fonds de commerce, que vous soyez vendeur ou acquéreur.
Avec notre expertise, assurez-vous que votre transaction se déroule en toute sécurité et dans les meilleures conditions.
Le 19 août 2024,
Alexandre RONCOLETTA
[1] Article 16ter, §3 - Arrêté royal n°38 du 27 juillet 1967 organisant le statut social des travailleurs indépendants
[2] Article 41quinquies, §3 - Loi du 27 juin 1969 révisant l’arrêté-loi du 28 décembre 1944
[3] Article 50 - Code du recouvrement amiable et forcé des créances fiscales et non fiscales (CRAF)
